Négociations de fin de travaux

Le 25 avril prochain, les 130 élues et élus de la Constituante appuieront une dernière fois sur les petits boutons rouge et vert. Ou peut-être sur le bouton blanc pour les abstentionnistes. Pourtant, après 5 ans, la mission est remplie : le Valais dispose d’une nouvelle Constitution capable de remplacer celle de 1907. Le peuple dira s’il veut ce nouveau texte au printemps 2024. 

Mais avant cette campagne à venir, c’est l’heure des comptes. Et même pour les observatrices et observateurs les plus avisés des travaux de la Constituante, force est de constater que les derniers mois ont été marqués par une succession rapide de choix importants. 

Flashback

Petit retour sur le déroulé : fin octobre 2022, la Constituante mettait la dernière touche à son texte de 2ème lecture. Ne restaient alors ouverts que certains des sujets les plus « chauds » du projet. En tête de liste : le droit de vote au plan communal des personnes avec un permis C (résidant depuis 10 ans en Suisse), la composition du Conseil d’Etat (5 ou 7 membres) et son mode d’élection (majoritaire ou proportionnelle), le droit de choisir librement une fin de vie digne ou encore les relations entre les deux parties linguistiques du canton. Ces points étaient au cœur de la lecture 2bis, sorte de 3ème lecture très partielle. 

En vue de cette dernière série de négociations qui s’étend de janvier à février 2023, les groupes politiques décident de se parler. Beaucoup. Les téléphones chauffent, on s’écrit, on organise des rencontres pour débattre des vrais arbitrages, ceux qui arrivent nécessairement en fin de parcours. La première de ces questions, essentielle : comment assurer le plus large consensus possible auprès des citoyennes et citoyens pour le vote final au printemps 2024 ? En d’autres mots, comment faire accepter le résultat des travaux ? 

Dans les cantons de Vaud, Fribourg ou Genève, les récits de constituants concordent. La phase finale est une phase d’intenses négociations pour donner au texte les meilleures chances lors de la votation populaire finale. L’expérience valaisanne n’a pas dérogé à cette règle. Depuis début 2022, l’équipe Appel Citoyen a insisté pour que l’ensemble des mouvements politiques s’assoit à la table des négociations. Il est impossible de faire émerger une solution de consensus lors d’une plénière de 130 personnes. Ainsi, nous avions initié une rencontre « table ronde » à Salquenen (février 2022) avec deux représentants de chacun des mouvements politiques, avec la facilitation de l’ancien secrétaire général de la Constituante fribourgeoise.

Intenses tractations

Dans les dernières semaines de discussions, plusieurs lignes ont bougé. Voici un résumé à grands traits, avec mention de la numérotation du document de lecture 2bis (disponible ici) : 

      Les droits politiques des personnes en situation de handicap ont été acceptés (Art. 45). Le Valais s’engage ainsi à respecter les engagements de la Convention internationale relatives aux droits des personnes handicapées.

      L’article portant sur la représentation équilibrée  des hommes et des femmes déploie son effet sur l’ensemble des organes politiques, et non plus seulement au niveau cantonal (Art. 187).  

      Le droit de vote et d’éligibilité au niveau communal pour toutes les personnes au bénéfice d’un permis d’établissement (10 ans de séjour en Suisse) a été accepté par la majorité (Art. 45). Le 25 avril prochain, la Constituante décidera ou non de proposer un vote sur une variante au peuple valaisan. Au printemps 2024, les citoyennes et citoyens devront ainsi accepter (ou refuser) le texte général et se déterminer sur le retrait des droits de vote des étrangers au niveau communal.

      Le Conseil d’Etat est élu à la majoritaire (Art. 47). A la différence du système actuel, le Conseil d’Etat compte 7 membres et l’élection a lieu sur un bulletin unique (et non pas via des listes partisanes qui tendent à favoriser les partis majoritaires).

      Le droit de choisir librement une fin de vie digne est confirmé (Art. 17). 

      Le Haut-Valais ne dispose d’aucune protection particulière à long terme pour sa représentation au Grand Conseil (Art. 67). Toutefois, une disposition transitoire fait en sorte qu’il ne perde qu’un seul siège lors des élections cantonales de 2025, au lieu de deux. 

Avec ce texte final, les représentantes et représentants de la majorité des groupes politiques (VLR, Le Centre, PS, Verts, Appel Citoyen) ont déclaré être prêts à s’engager en faveur du compromis. Personne n’est parfaitement heureux, personne n’est parfaitement triste. Chacun a mis de l’eau dans son vin pour faire émerger un texte équilibré. Un texte qui reflète les majorités politiques que le peuple a choisies en automne 2018. A nous maintenant de faire grandir la majorité pour que la nouvelle Constitution soit acceptée largement au printemps 2024.

 

Crédits: image d’illustration créée avec Dall-e, prompt: a picture of the castles of Sion in the style of Matisse