Quel statut pour les collectivités religieuses en Valais ?

Cet article s’inscrit dans les réflexions que la Constituante valaisanne doit faire sur les relations entre l’Etat et les collectivités religieuses. Il est le 2ed’une série de trois articles sur le sujet.

Au niveau fédéral aucune neutralité n’est imposée dans l’espace public. Par exemple, le port de signes distinctifs religieux n’est interdit ni dans l’administration, ni dans les écoles ; cela n’a pas toujours été le cas et le Parlement fédéral a dû modifier la constitution à la suite de plusieurs arrêts du TF, dont celui célèbre sur les crucifix. S’agissant des cours de catéchisme chrétien, ils peuvent être dispensés à l’école publique, mais leur fréquentation n’est pas obligatoire. Les plans d’études (le plan d’études romand notamment) laissent la liberté aux cantons de traiter de cet enseignement. Le Valais n’intitule plus son enseignement religieux « catéchisme » mais de manière plus globale, pour éviter le reproche de sectarisme. A noter une curiosité valaisanne, la loi prévoit toujours que l’évêque est compétent pour décider qui est chargé de cet enseignement.

Par contre, l’Etat fédéral et cantonal doivent respecter les principes constitutionnels tels que l’égalité de traitement, non seulement entre les citoyens, mais également entre les collectivités religieuses. Dès lors, l’Etat doit rester aussi neutre que possible vis-à-vis des collectivités religieuses [1]. Dans les constitutions récemment révisées, on note une séparation bien plus nette entre l’Etat et les collectivités religieuses qu’auparavant.

La liberté de conscience et de croyance

Tout comme la Constitution fédérale [2], la Constitution valaisanne garantit la liberté de conscience et de croyance et le libre exercice du culte [3]. La liberté de religion est un droit fondamental, qui ne peut être restreint qu’à certaines conditions (la restriction est prévue par une base légale, elle poursuit un intérêt public et elle est proportionnée) [4]. Toute personne est libre de quitter une communauté religieuse ou de se convertir et les collectivités religieuses sont libres de s’organiser de manière autonome, dans les limites du droit public [5].

Quel statut pour les collectivités religieuses ?

Les cantons choisissent leur modèle de relation entre l’Etat et les collectivités religieuses, dans le respect des principes constitutionnels cités ci-dessus. Ils peuvent accorder deux sortes de statut aux collectivités religieuses : le statut de droit public, ou le statut de droit privé.

Le statut de droit public est un statut privilégié, qui donne le droit d’encaisser des impôts et d’avoir un accès facilité aux infrastructures étatiques (écoles, hôpitaux, prisons, etc.) : il offre donc un avantage concurrentiel par rapport aux collectivités non reconnues. La plupart des cantons, compétents pour attribuer l’un ou l’autre statut, ont accordé un statut de droit public aux Eglises protestante réformée et catholique romaine. En reconnaissant un statut de droit public, l’Etat reconnaît les activités d’une collectivité religieuse dans l’intérêt général et s’assure d’une bonne collaboration avec une collectivité religieuse donnée.

Depuis quelques années, certains cantons reconnaissent à d’autres minorités religieuses un statut de droit privé, mais avec une reconnaissance d’intérêt public. A titre d’exemple, six cantons ont reconnu d’intérêt public leur communauté israélite (Bâle-Ville, Fribourg, Saint-Gall, Berne, Zurich et Vaud) et seul Bâle-Ville a reconnu une communauté musulmane, en l’occurrence la communauté alévie [6].

Le Valais reconnaît à ce jour, le statut de droit public à l’Eglise catholique romaine et à l’Eglise réformée évangélique (Eglise protestante) [7]. Les autres confessions sont soumises au droit privé, et peuvent être reconnues d’intérêt général ou public.

La question qui se pose donc est de savoir si d’autres collectivités religieuses pourraient être reconnues de droit public, et si oui, à quelles conditions. Les Constituants devront répondre à cette double question.

Jean Zermatten

 

Références

[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Religion_en_Suisse.

[2]Art. 15 Cst. féd. (RS 101).

[3]Art. 2 al. 1 Cst./VS (RS/VS 101.1).

[4]Art. 36 Cst. féd. (RS 101).

[5]Art. 2 al. 2 Cst./VS (RS/VS 101.1).

[6] https://www.cic-info.ch/communautes-reconnues/.

[7] Art. 2 al. 3 Cst./VS (RS/VS 101.1).